L’ANGLE MORT
PATRICK-MARIO BERNARD, PIERRE TRIVIDIC – 1H45, FRANCE, 2019
AVEC JEAN-CHRISTOPHE FOLLY, ISABELLE CARRÉ, GOLSHIFTEH FARAHANI
Dominick Brassan a le pouvoir de se rendre invisible. Il ne s’en sert pas beaucoup. À quoi bon, d’ailleurs ? Il a fait de son pouvoir un secret vaguement honteux, qu’il dissimule même à sa fiancée, Viveka. Et puis vient un jour où le pouvoir se détraque et échappe à son contrôle en bouleversant sa vie, ses amitiés et ses amours.
Cinéastes trop rares dans le paysage cinématographique français, Pierre Trividic et Patrick-Mario Bernard nous offrent un film fantastique, un conte où les fées se penchent sur un berceau, catapulté dans une ville contemporaine de souterrains, de nuits illuminées et de jours trop crus. Après Dancing et L’Autre, ils élaborent un nouvel espace intérieur et métaphysique où leur personnage principal, Dominick, s’abrite maladroitement de la violence du monde. Cette fois, ils lui confèrent une aura concrète, visible, dont l’explication surnaturelle ouvre à l’intime une brèche entre le réalisme politique et l’art de faire tourner devant la lanterne des images fortes et énigmatiques. Dominick est doué d’une force vitale qui ne va pas de soi. Corps nu, il incarne la violence d’être noir dans une société discriminante rappelant peut-être le Ralph Ellison de Invisible Man. Son cheminement ouvre pourtant à l’angoisse commune de vieillir, et celle diffuse et entêtante de ne vivre sa vie qu’à moitié.
Aurélia Barbet et Laure Vermeersch, cinéastes